Nomes


Diachronie et éthymologie

"Le terme grec nomos (voµos) avait été employé chez Hérodote pour parler des grandes subdivisions de certaines contrées barbares et surtout le royaume d’Égypte, dont le découpage homogène et constant en circonscriptions gouvernées par un fonctionnaire du gouvernement central, un « nomarque », était caractéristique."

"La langue des égyptologues en a tiré le mot français « nome » qu’on emploie pour parler des divisions territoriales de l’Égypte antique, quelle que soit l’époque considérée, et pour commencer des provinces, dites sepat (Z1 - <span class=Translit ></span>X1 - <span class=Translit >t</span>N24 - <span class=Translit >Hsp / spAt</span>) en égyptien, qui avaient été instituées au IIIe millénaire avant notre ère.
Après 1870 avant J.-C., la carte de ces nomes-là ne correspond plus aux réalités administratives, mais la liste fossilisée de leurs capitales fut conservée traditionnellement jusqu’à la fin du paganisme, comme représentation idéale du pays dans le vocabulaire hiéroglyphique et dans l’iconographie des temples."

"En fait, l’Égypte réelle aux VII-IVe s. avant notre ère, se trouvait divisée en circonscriptions désignées par les mots tosh ou kahi (dans la partie médiane de la Vallée). L’administration ptolémaïque les conserva, dans l’ensemble sous le nom grec de nomoi en faisant suivre le mot « nome » d’un adjectif se référant le plus souvent à la métropole, siège du gouverneur (le stratège du nome)."
Extrait de [Strabon 1997], p. 66, note 19.

"La documentation démotique et grecque des IVe-Ier s. permet de dénombrer environ les 40 nomes réels."

"La géographie sacrée qui comptait auparavant 39 territoires canoniques (sepat) en arrête le nombre à 42 dans les temples ptolémaïques, mais transmet concurremment un chiffre de 36 sepat. Un texte scolaire démotique corrige « 36 sepat » en « 39 »."

"Il semble qu’à l’AE, le nombre primitif des nomes ait effectivement été de 36, et on peut croire que ce nombre aligné tardivement sur celui des 36 décans de l’astrologie (Rituel de l’Embaumement, 8, 12-14) demeura proverbialement consacré."
Extrait de [Strabon 1997], p. 66 et 68, note 22.


Quelques définitions

(texte de Bernard Mury)
Le nome est une division administrative de l'Égypte antique. La carte et la liste ci-dessous permettent d'accéder au détail de chaque nome.

Découpage des nomes
Le pays est composé de deux "Terres", la Haute et la Basse Égypte. La division de la Haute Égypte en 22 nomes, suivant le cours du Nil, n'évolue pratiquement pas au cours du temps. Il en va tout autrement pour le classement des nomes de Basse Égypte.
Selon les représentations des nomes figurant sur la « Chapelle Blanche » (CB) de Sésostris 1er (XIIème dynastie), la Basse Égypte compte 16 nomes ; un nouveau nome est ajouté à la XVIIIème dynastie.
Dans les représentations des nomes sur les murs de la « Chapelle Rouge » (CR) d'Hatchepsout (XVIIIème dynastie), nous retrouvons le même séquencement de 17 nomes en Basse Égypte.
L'ordre de gauche à droite est le suivant : 1 - 2 - 3 - 4 - 5 - 6 - 7 - 8 - 9 - 11 - 10 - 12 - 15 - 16 - 13 - 14 - 17
pour la CB, 4 et 5 sont presque illisibles, 11, 10, 12 et 15 ont disparu, et 17 est un ajout de la XVIIIème dynastie.
pour la CR, 1, 2, 6, 7, 13 et 14 ont disparu.

L'époque ptolémaïque compte toujours 22 nomes en Haute Égypte, et 20 en Basse Égypte comme présenté plus bas.

Surface des nomes
Les frontières entre nomes ne sont pas connues avec exactitude et ont d'ailleurs probablement évolué au cours des siècles. Les soubassements de la CB apportent des précisions importantes sur le calcul des surfaces de chaque nome. On trouvera ce détail dans le corpus de textes (texte n°66), avec la traduction complète du monument.
Une discussion sur le calcul de surface est également disponible sur la page relative aux mesures.

Nomes et religion
Chaque nome révérait un dieu tutélaire principal, mais aussi d’autres dieux, ainsi que l'attestent les fêtes religieuses locales, les prêtres, la barque sacrée pour les processions. Ce que nous appelons la « Chapelle Blanche » est en fait un reposoir pour les processions de la barque sacrée.

Les "interdits"
Signalons au lecteur que les interdictions propres à chaque nome ne sont inspirées ni par la morale ni par les règles d’hygiène ; elles sont plutôt en rapport avec le culte ou avec un mythe local. Ces « interdits » sont le plus souvent en lien avec un épisode de la vie du dieu local, qui lui fut pénible et dont on ne doit pas lui rappeler le souvenir. Dans d’autres cas, par exemple, quoi de plus naturel pour le dieu Bélier que de vouloir protéger les béliers.
Nos principales références pour ces "interdits" sont [Montet 1957] et [Sydney Aufrère].

Les "lambeaux d'Osiris", ou reliques osiriennes
Seth a tué Osiris, l’a découpé en morceaux et les a dispersés dans toute l’Égypte. Isis a rassemblé ces « lambeaux », a reconstitué le corps d'Osiris et l’a ressuscité temporairement.
Chaque nome où s’était trouvée une partie du corps d’Osiris considérait ce fragment comme une « relique ».


Bibliographie

* [Sydney Aufrère] - Les interdits religieux des nomes dans les monographies en Egypte, un autre regard
* [Pierre Lacau et Henri Chevrier] - Une chapelle de Sésostris Ier à Karnak
* [Pierre Lacau et Henri Chevrier] - Une chapelle d'Hatshepsout à Karnak
* [Pierre Montet] - Géographie de l'Égypte Ancienne
* [John Baines and Jaromir Malek] - Atlas de l'Égypte
* [Bertha Porter and Rosalind L. B. Moss] - Topographical Bibliography of Ancient Egyptian Hieroglyphic Texts, Reliefs, and Paintings
* Jacques Vandier - La religion égyptienne, PUF, Paris, 1944
* Gustave Lefebvre - Romans et contes égyptiens de l'époque pharaonique, Paris, 1949
* Victor Loret - Les fêtes d'Osiris au mois de khoiak
* Wallis Budge - Osiris and the egyptian resurection - Vol II
* Wallis Budge - The Gods of the Egyptians
* pour les "lambeaux d'Osiris" : Horst Beinlich - Die « Osirisreliquien » Zum Motiv der Körperzergliederung in der altägyptischen Religion, Wiesbaden, 1984

 

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Basse Egypte

Nl1 - Memphis - le mur blanc (muraille blanche)
Nl2 - Létopolis (Ausim) - la cuisse
Nl3 - Apis (Kom el Hisn) - l'Occident
Nl4 - Prosopites (Buto) - la cible du Sud (Neith inférieur)
Nl5 - Saïs - la cible du Nord (Neith supérieur)
Nl6 - Xoïs - le taureau du désert (montagne)
Nl7 - Métélis - le harpon (à cordes) occidental
Nl8 - Hérôonpolis (Pithôm) - le harpon (à cordes) oriental
Nl9 - Busiris - le protecteur
Nl10 - Athribis - le grand taureau noir
Nl11 - Kabasos / Pharbaethos (Leontopolis) - le taureau des bandelettes (taureau recensé)
Nl12 - Sébennytos - le veau de la vache (le veau divin)
Nl13 - Héliopolis - le pilier (sceptre intact)
Nl14 - Sethroites (Sile... Pelusium) - la pointe d'orient (le dressoir oriental)
Nl15 - Hermopolis (el-Baqliya) - l’ibis (el-Baqliya)
Nl16 - Mendès - Le dauphin
Nl17 - Diospolis (el-Balamun) - le sanctuaire d'Horus (le Trône)
Nl18 - Bubastis - l'enfant royal supérieur
Nl19 - Léontopolis - l'enfant royal inférieur
Nl20 - Arabia (Saft el-Henneh) - le faucon momifié

Haute Egypte

Nu1 - Elephantine (Aswân) - l’arc ou Éléphantine (pays de Nubie)
Nu2 - Apollinopolis Magna (Edfou) - trône d'Horus
Nu3 - Eileithysia (Hierakonpolis / El-Khab et Esna) - les deux plumes (la forteresse)
Nu4 - Thèbes - le sceptre ouas
Nu5 - Coptos (Koptos) - le sceptre, les deux faucons
Nu6 - Tentyris (Dendera) - le crocodile
Nu7 - Diospolis Parva (Hiu) - le sistre (Bât)
Nu8 - Thinis... puis Abydos - le reliquaire d’Osiris
Nu9 - Panopolis (Akmim) - la foudre de Min
Nu10 - Aphroditopolis (Anteapolis) - le serpent (cobra)
Nu11 - Hypselis (Shutub) - le lévrier (Seth)
Nu12 - Antaeopolis (el Ataula) - le mont du serpent (vipère de la montagne)
Nu13 - Lycopolis (Asyut) - le térébinthe supérieur (*)
Nu14 - Cusae (el-Qousiya) - le térébinthe inférieur (*)
Nu15 - Hermopolis (Ashmounein) - le lièvre
Nu16 - Oryx (Minia) - l'oryx blanc ou la gazelle
Nu17 - Cynopolis (Hardai) - le chacal (ou le chien noir)
Nu18 - Ankyronpolis ou Hipponos (el-Hiba) - l’épervier volant, le faucon aux ailes déployées, « celui qui étend ses serres »
Nu19 - Oxyrhynchus - le sceptre pur (ou les deux sceptres)
Nu20 - Hérakleopolis Magna (Ihnasya el Medina) - le laurier rose supérieur
Nu21 - Medinet el-Fayoum ... Meidum - le laurier rose inférieur
Nu22 - Aphroditopolis (Atfih) - le couteau

Ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait (Mark Twain)